Etienne Liebig* a publié il y a quelques temps de cela un ouvrage qui s’intitule  » Les nouveaux cons ».

Je vous le recommande en lecture.

Pour vous donner l’envie de le lire, je publie aujourd’hui, avec l’aimable autorisation de son auteur le chapitre « l’énarque ».

Régis Ollivier

 

 

L’énarque

« Dans cette époque tragique où la loi de la performance est la seule qui prévale dans de multiples domaines, il existe pourtant une école où l’on forme une génération de nouveaux cons de grande envergure : l’ENA.

Songez que la plupart des dirigeants de ce pays sont issus de grandes écoles, phénomène unique en Europe, où l’on demande à l’élite d’avoir une pure connaissance théorique des phénomènes économiques et sociaux plutôt que de connaitre et d’exceller par l’expérience dans une spécialité précise.

Le Crédit Lyonnais, le Crédit foncier, l’Agence française de développement ou la banque de France étaient des boites dirigées par des énarques. Elles ont été ruinées suite à des erreurs monumentales de gestion et ont dépouillé les contribuables en même temps.

La SNCF, la RATP, EDF, la caisse des dépôts et consignations ont été mis en faillites par ces énarques tout-puissants, qui n’auraient jamais supporté la moindre remise en question de leurs compétences. 

Certes l’ENA a toujours existé et Bourdieu reprochait déjà à cette élite de maintenir le pays dans une vision étriquée et désuète, de reproduire des mécanismes acquis, mais elle n’exerçait que dans certains domaines, en politique surtout, où elle nuisait par excès de technocratie.

Aujourd’hui, ces nouveaux cons se sont infiltrés partout, persuadés qu’il suffit de sortir d’une école prestigieuse pour devenir un dirigeant de n’importe quoi.

On les voit à la Santé, par exemple, où leur approche purement comptable crée une distance guerrière avec les gens de terrain.

On les voit à la radio ou à la télé, lorsque leur cruel manque d’expérience les rend ridicules, pathétiques et dangereux.

L’énarque fait carrière, c’est à dire suit un cursus ascendant dans lequel le principe de l’incompétence est mille fois dépassé.

Il peut être chef de cabinet, puis diriger une entreprise de confiture, revenir à la tête d’un syndicat avant de prendre un maroquin ministériel puis repartir finalement vers la banque.

Les compétences et les connaissances en la matière ne servent à rien.

Cela serait drôle et même idéal si ça marchait, mais ça ne marche pas et tandis que les énarques se multiplient partout, le pays s’enfonce dans la crise en additionnant les erreurs de gestion à tous les niveaux.

Les énarques se reproduisent de père en fils, la soupe est trop bonne pour la laisser à d’autres. Et pourquoi se soutiennent-ils s’ils sont si nuls, me direz-vous, mais simplement parce qu’ils préféreront toujours un ennemi politique issu de l’ENA à un ami venant de l’ascension pragmatique et laborieuse.

Peu à peu et malgré les scandales à répétition et les preuves patentes de leur incompétence, ils se sont installés partout en prenant le pouvoir au nez et à la barbe des gens en place, qui avaient appris sur le tas.

Bizarrement plus Etats-Unis, l’Allemagne et la Chine confient des responsabilités et du pouvoir aux femmes et aux hommes de terrain, plus la France se fabrique une élite bidon formée à l’excellence administrative, fuyant les innovations et reproduisant les recettes de leurs grands-pères. »

Mon commentaire personnel – Toute ressemblance avec des personnages existants ou ayant existé ne serait que pure coïncidence

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Étienne Liebig

Etienne Liebig est romancier, essayiste et anthropologue. Il est l’auteur des livres suivant : “Les ados sont insupportables mais ce sont nos enfants” (2009) ; “Les pauvres préfèrent la banlieue” (2010) ou encore “De l’utilité politique des roms” (2012) * Educateur spécialisé auprès des adolescents, Etienne Liebig est aussi critique pour le magazine Zélium, chroniqueur aux Grandes Gueules sur RMC.

Nota: L’énarque è l’allievo uscito dall’ ENA ( Ecole Nationale d’Administration ), più in generale il tecnocrate, il “manager”.

Postato da S.Sinibaldi